Photographe de portrait  Toulouse, Lausanne

Photographe de portrait à Toulouse, à Lausanne, à Auch … j’adore observer, imaginer, inventer, croiser le réel et l’imaginaire. Perdre la notion trop vive de réalité et pourtant s’en servir pour photographier et écrire.

Lorsque j’ai découvert l’Hotel de France à Auch, il y a quelques années, il a vite fait partie de nos vies. Nous habitions à côté et allions souvent à la brasserie. Jusqu’à ce que je découvre la grande salle, qui était encore “dans son jus”, un style désuet, plein de charme endormi. L’an dernier, lorsque j’ai retrouvé la grande salle, qui a été rénovée, je ne l’ai pas reconnue. Sublime, majestueuse, la vieille dame avait rajeunie, d’une allure folle. Je pouvais entendre des histoires, imaginer, des voyageurs, me lover au creux du velours clair et tendre.

Je ne sais pas pourquoi, j’ai pensé aux gares parisiennes, à l’autrefois qui s’invite dans nos jours du XXIè siècle. J’ai imaginé une voyageuse qui s’arrêterait là, perdue dans ses pensées, captive amoureuse d’un temps suspendu, prisonnière amoureuse d’un rendez-vous mystérieux. Alors ce shooting d’inspiration est né : un portrait en photos et en mots La Voyageuse.

Un immense merci à l’Hôtel de France à Auch, d’avoir accueilli notre shooting dans vos murs sublimes, à Cocotte et Coquette pour la décoration (téléphone, valises), à Christelle du Studio Beauté 32 pour le maquillage, à Perrine de Changez d’Air pour la coiffure de la modèle, à Emmanuelle pour avoir incarné cette mystérieuse voyageuse.

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Portrait intime d’une voyageuse

Elle attend. Elle l’attend. Il lui semble que ce sera la dernière fois. La salle est vide, silencieuse, ordonnée. Les bruits de l’hôtel qui vit, lui parviennent, assourdis. Elle s’est assise près de l’entrée, non loin d’une fenêtre, elle veut voir si quelqu’un entre. Les grandes portes vitrées cultivent le silence qui murit ses pensées.

Elle se dit qu’elle a attendu toute sa vie, finalement. Qu’on l’aime, qu’on reconnaisse son travail, qu’on la valide. Maintenant elle n’a plus le temps d’attendre les autres, leur avis, leur regard. C’est devenu un luxe. Elle en sourit.

Pourtant aujourd’hui, elle attend. Elle est prête à attendre jusqu’à la nuit tombée s’il le faut. La grande salle lui semble comme un oasis à l’abri du temps qui file. Dehors l’attendent des décisions et des actions. Mais à l’intérieur, la majesté calme de la pièce déserte offre une capsule hors du temps. Une indulgence à la rêverie. Bercée par la douceur du velours claire et reposée par la sérénité des murs sombres, elle donne libre cours à ses pensées. Ses prières. Elle se prie. D’oser. Elle ne peut pas faire taire son cœur qui bat trop fort. Son regard se perd dans le dessin raffiné des vitraux qui habillent la lumière blanche.

Pour faire passer le temps elle ouvre son livre. Elle l’aime. La couverture vieillie s’offre, rugueuse sous ses doigts, comme une vie vécue. C’est un cadeau de la seule personne qui lui ait jamais dit « pars ». Dedans, elle pioche des mots. Ils sont ses meilleurs amis. Depuis toujours. Ils voyagent entre ses livres et ses carnets.

Photographier l’attente

Elle l’attend. Son corps s’est entièrement rassemblé dans cette unique mission. Attendre. Désir fou. Conviction intime. Salut imaginaire. En fait, elle ne sait pas. Elle ne sait rien. Elle espère. Qu’Andrea viendra. C’est une vieille promesse, si vieille qu’elle en est peut-être morte. Il y a vingt ans, dans cette même salle, deux âmes s’étaient promises de revenir à cette même date ici.

Puis, elle se demande. Si l’on peut changer à tel point qu’on ne se reconnaisse pas. Si l’on peut oublier une vieille promesse scellée autour d’une table. Si Andrea existe encore. Si ce serment n’a pas pris la poussière. Elle a peur.

Depuis vingt ans, elle a voyagé sans relâche, troqué des départs contre des arrivées, déshabité de nombreux “chez-soi”. Elle s’est approprié les séparations. N’importe lesquelles. Avec une précision chirurgicale : savoir ce qu’on quitte, ce qui ne reviendra plus, ce qui en valait la peine. Son cœur est un abri antiatomique. Elle a l’habitude. Mais voilà qu’aujourd’hui, les parois fondent, le coeur est atteint. Et si l’autre ne venait pas ?

Le silence peuple les minutes. A travers la fenêtre, elle croit distinguer sa silhouette, mais non c’est quelqu’un d’autre. Se calmer, remuer tranquillement son thé. Se perdre dans la contemplation de cette soucoupe qui ressemble à sa vie. Elle savoure les cercles concentriques colorés, une couleur pour chaque vie vécue. Elle sourit devant ce croissant de vide sur le bord, qui donne toute son originalité à la soucoupe. On dirait une morsure. L’absence d’Andrea est une morsure, un vide qui s’est fait une place dans sa vie et lui a probablement donné son originalité. Elle n’a jamais oublié la folie déroutante rieuse et meurtrière de ces grands yeux bleus. Tour à tour interrogateurs, exigeants, absents. Ce front caché sous les boucles. Cette voix haute en couleur. Cette force de vie. Encre indélébile, libellée à son adresse.

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Le silence en photo

Ses valises sont prêtes, cette fois, elle part. Définitivement. Elle ne reviendra plus. Elle a souvent réfléchi au caractère trempé et scellé du mot « plus ». C’est encore plus effrayant quand on le décide soi-même.

Et si Andrea n’avait pas survécu ? Si ce visage familier reposait maintenant quelque part sous la terre, incapable de revenir vers elle, de s’émouvoir, se moquer, rire et pleurer. Pire, si Andrea était aujourd’hui l’adulte d’une autre vie, ayant enfoui l’enfant et sa promesse, dans les décombres du temps ? Si elle avait oublié ?

Le silence se remplit de questions grinçantes.

Elle pourrait passer un coup de fil, vérifier, s’assurer que l’autre viendra. Elle décrocherait, demanderait des nouvelles d’un destin perdu, insisterait et elle aurait une réponse. Définitive peut-être. Il y a ce téléphone d’antan, là. Elle le caresse, nostalgique. Murmure une conversation imaginaire. Mais non, elle repose le combiné. Ce n’est pas du jeu. Le rendez vous a été pris il y a vingt ans, il n’y a plus rien à changer. Il n’y a aucune sécurité à apporter. Il n’y a qu’à être présente, ou pas.

L’après-midi touche à sa fin. Personne n’est entré, personne n’est sorti. Son cœur embué de souvenirs se noie dans les cercles, se refroidit comme son thé, s’assombrit comme la lumière du jour. Elle attend.

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